Journée pour les arrondissements 2009

Rapport sur le Rendez-vous sur la médiation culturelle pour les arrondissements montréalais
(Salle de diffusion Parc-Extension, 3 novembre 2009)

Lors de cette journée, plus de 70 intervenants, gestionnaires et spécialistes se sont rassemblés afin d’échanger et de dresser un portrait dynamique des actions menées en médiation culturelle par les arrondissements de Montréal au cours des cinq années précédentes. Agents culturels, chefs de division et médiateurs de la Ville de Montréal étaient invités à faire connaître un projet réalisé avec la collaboration financière du Programme de médiation culturelle des arrondissements montréalais.

Onze projets ont été présentés, impliquant adolescents, femmes immigrantes, aînés, et étudiants. Les points communs de ces projets : une grande implication de tous, artistes, agents culturels, médiateurs et participants ainsi qu’une très bonne connaissance des enjeux locaux et des différentes communautés.


Conférence d’ouverture de Jean-Marc Fontan
– résumé
Citation Jean-Marc FontanD’entrée de jeu, une présentation du chercheur Jean-Marc Fontan a mis l’accent sur les deux pôles de l’accessibilité culturelle, soit la démocratie (partie prenante de la culture) et la démocratisation (développement de publics). Cette approche a permis de placer la journée sous le signe des choix d’actions culturelles selon la population des quartiers et les réseaux locaux en place.

Développement et médiation culturelle
En œuvrant dans une logique de développement culturel, les acteurs publics montréalais de la médiation culturelle souhaitent transformer soit quantitativement soit qualitativement leur environnement grâce à la culture.

La culture, tel qu’elle est codifiée actuellement, n’est pas accessible à tous. C’est pourquoi l’approche par la médiation est pertinente : elle permet une meilleure cohésion sociale; elle crée un pont entre le citoyen et la démarche culturelle.

Dans la mouvance actuelle, l’intermédiaire humain qu’est le médiateur culturel assure une prise en compte de la crise des valeurs, des conflits de référence, des difficultés de coexistence. Il est donc logique que la Ville et son partenaire le Ministère de la Culture, des Communications et de la Condition féminine aient ciblé l’approche de la médiation culturelle dans leur plan d’action respectif pour des raisons citoyennes et pour son caractère rassembleur.

Définitions
Jean-Marc Fontan rappelle que la littérature scientifique identifie plusieurs types de médiation culturelle, de l’accompagnement des publics au rapprochement des communautés en passant par la mise en relation du citoyen avec l’œuvre. De surcroît, cette démarche peut s’exercer dans de multiples contextes – démarche citoyenne, ludique, festive, marchande, politique ou encore sacrée. Bref, une définition universitaire de la médiation culturelle s’ouvre nécessairement sur de multiples finalités.

En contrepartie, sur le terrain, la démarche de médiation culturelle appelle plus facilement l’identification des enjeux. Ainsi un organisme tel Culture pour tous définit la médiation culturelle à partir de deux pôles citoyens dominants, soit la démocratie culturelle, qui fait référence à la participation directe du citoyen à la vie culturelle, et la démocratisation culturelle, qui favorise l’accessibilité du plus grand nombre de citoyens aux arts et à la culture. Les différentes activités de médiation s’échelonnent sur cet axe repère.

À cet effet, Jean Marc Fontan rappelle qu’une étude récente des chercheurs Bélanger et Jacob de l’UQAM constate que plus de 55 % des projets étudiés en médiation culturelle sur le territoire montréalais visait la démocratisation culturelle. Cette étude a permis d’établir un répertoire des pratiques en médiation culturelle à partir des 190 projets soutenus dans le cadre de l’Entente sur le développement culturel de Montréal de 2005 à 2008.

Finalités et principaux enjeux pour Montréal
Jean Marc Fontan identifie cinq grandes finalités pour les projets de médiation culturelle. Ce sont les finalités économiques, politique, sociale/identitaire, sociétale et artistique. Pour Montréal, le chercheur relie les enjeux propres à ce territoire à deux finalités : la première, sociale/identitaire avec l’interculturalisme, et la seconde, la finalité économique incarnée dans la lutte contre la pauvreté.

En ce sens, la médiation culturelle ne peut être examinée isolément. Elle s’inscrit dans un tout, un système (Kaiser) composé de plusieurs actes. Ce système comprend expression artistique, action sociale et intervention territorialisée.

En terminant, M. Fontan note également la très grande dépendance de la Ville à l’endroit de ses partenaires gouvernementaux, provincial et fédéral, ce qui rend Montréal fragile lors des changements politiques des gouvernements supérieurs. La pérennité du financement à l’endroit de la Ville et de ses programmes est également un enjeu de taille dans le contexte de la médiation culturelle, dont la formule nécessite un déploiement financier à long terme.

Le conférencier constate que la médiation culturelle est tangible dans les arrondissements montréalais et qu’elle est dorénavant partie prenante de la mission de la Ville. Pour s’assurer que cette approche de développement culturel continue à se déployer sur le territoire montréalais, Jean-Marc Fontan recommande la mise en place de mécanismes de suivi et d’évaluation ainsi que la reconsidération des ressources et responsabilités nécessaires à la réalisation de ce qu’il considère comme une nouvelle responsabilité municipale.

Jean-Marc Fontan est professeur-chercheur au département de sociologie de l’Université du Québec à Montréal (UQAM); membre du Groupe de recherche sur la médiation culturelle; directeur de l’Alliance de recherche universités communautés en économie sociale (ARUC-ÉS).


Aperçu des différentes tables rondes

Table ronde nº 1 : La médiation culturelle… dans la communauté
Cette table ronde a mis en lumière quatre approches citoyennes différentes qui favorisent les collaborations mixtes et hybrides afin de rejoindre les citoyens dans leur communauté. Qu’il s’agisse d’un parc, d’un centre commercial, d’un organisme communautaire ou d’un espace public, le choix du lieu de rencontre prend tout son sens pour les participants des projets, autant pour les artistes que pour la population. En allant sur le territoire de l’autre, l’échange se fait naturellement et le partage culturel devient réalité.

Le pouvoir de la parole Si l’art public m’était conté Les rendez-vous printaniers Ôs avec nous et Hors-les- murs

Conclusion : La clé du succès de ce type de projets hybrides dans la communauté réside dans une bonne connaissance des citoyens et des groupes locaux. Ainsi, les participants aux projets peuvent s’identifier aux relais de leur milieu et poursuivre leur démarche culturelle en profondeur, même après la fin du projet. L’ancrage dans la communauté devient un gage de réussite dans ces rencontres et suscite souvent des suites imprévisibles.

Les présentations de cette table ronde permettent de souligner les retombées positives des différentes initiatives : l’éveil de l’engagement des jeunes, la sensibilisation des élus à l’art et à la culture, le renforcement du travail d’équipe au sein de l’appareil municipal, l’intérêt de la population pour l’art dans l’espace public. Ces projets auront permis de rejoindre des publics éloignés de l’offre culturelle et ainsi, de toucher les citoyens au cœur même de leur milieu de vie.


Table ronde nº 2: La médiation culturelle… à l’école

Comment rejoindre les jeunes dans les écoles? Comment faire durer leur intérêt pendant plusieurs semaines? Comment éveiller leur créativité? La médiation culturelle à l’école doit composer avec plusieurs enjeux. La table ronde sur cette question les a mis en lumière tout en montrant les liens étroits qui se sont développés entre les écoles montréalaises et les intervenants culturels des arrondissements montréalais. À cet effet, les quatre exemples retenus reflètent bien l’engagement de tous les arrondissements montréalais à l’endroit des écoles de leur quartier et de « leurs » jeunes.

Vidéo hip-hop Les chemins de traverse Résidence d’artiste à l’école Les Fridolinades 1 et 2

Conclusion : Les participants ont constaté à quel point l’enjeu de la médiation culturelle avec les écoles réside dans la capacité de l’arrondissement à développer une relation de proximité et d’échanges avec les élèves. Dans tous les projets cités, l’implication des jeunes à l’une ou l’autre des phases de création ajoute généralement un liant à l’initiative culturelle proposée.

L’arrimage de l’arrondissement avec les objectifs pédagogiques des écoles ainsi que la présence à l’école même d’une personne-clé engagée dans le projet s’avèrent des conditions de réussite importantes. L’implication d’un artiste professionnel semble également être un facteur de réussite pour entrer en relation avec les jeunes.

Enfin, dans les écoles, comme ailleurs dans la communauté, la volonté des jeunes de poursuivre l’expérience demeure parfois en suspens. Le besoin de pérennité des actions de médiation devra éventuellement être pris en compte par les gestionnaires des projets et des programmes. L’harmonisation des enjeux entre les partenaires, nommément le MCCCF et le ministère de l’Éducation, devrait prendre une place plus conséquente dans les priorités gouvernementales.


Table ronde nº 3 : La médiation culturelle… autour d’une programmation artistique

Cette table ronde a montré l’évolution des programmations artistiques accompagnées d’activités de médiation au cours des dernières années dans les arrondissements. Déjà habituées à mettre en place des activités de développement de publics, les équipes culturelles en arrondissement ont naturellement poussé plus avant la démarche d’accessibilité en instaurant des projets de médiation. Les projets présentés en témoignent.

Siguaniwi et le secret des couleurs Apéro culturel Une journée dans la vie de Maggy M

Conclusion : À l’instar des deux autres tables, celle-ci appelle une pérennité auprès des clientèles rejointes, ainsi qu’une réflexion quant aux potentiels des transferts de modèles et d’expertises entre les arrondissements. De plus, les pratiques de travail en médiation et le potentiel offert dans ce domaine provoquent des besoins nouveaux en termes de ressources techniques et humaines.

Les participants ont insisté également sur l’intérêt de développer des projets de médiation culturelle de divers types, autant liés au développement de publics qu’à la création et ce, afin de poursuivre le travail d’ouverture amorcé depuis plusieurs années au sein du réseau de diffusion municipale.

Enfin, tout le potentiel qu’offre la proximité des services publics municipaux dans le secteur culturel et l’influence bénéfique de ces derniers dans la qualité de vie des citoyens sont apparus clairement dans cette table ronde sur la médiation culturelle autour des programmations artistiques.


Perspectives

L’expérience du 3 novembre, une première dans la vie culturelle de la Ville de Montréal, a été concluante en termes de participation et d’échanges entourant les pratiques de médiation. À cet effet, nous aurons saisi tout le potentiel qu’offre la proximité des services publics municipaux dans tous les quartiers montréalais.

La Ville souhaite poursuivre les échanges et les initiatives entourant la médiation culturelle tant avec les organismes professionnels qu’auprès des arrondissements. Cette démarche est d’autant plus importante que nous sommes, en 2010, dans un contexte de renouvellement de l’Entente sur le développement culturel de Montréal.

Déjà, lors des échanges du 3 novembre, des éléments de réflexion ont pointé et certains enjeux évoqués pourraient se retrouver dans la mire des discussions à venir :

  • la pérennité des initiatives de médiation et la continuité des financements;
  • la nécessité de ressources humaines et techniques supplémentaires afin de mener à bien les projets de médiation;
  • les transferts de modèles et d’expertises entre les arrondissements.

Aussi, l’authenticité de chaque projet de médiation culturelle permet de penser qu’il faudrait assouplir les normes entourant les programmes de médiation.

La formation et l’information liées à la médiation, autant la présentation de Jean-Marc Fontan que les recherches citées en cours de journée -le Diagnostic du réseau municipal de diffusion culturelle d’Art Expert et le Répertoire raisonné des activités de médiation culturelle à Montréal de Louis Jacob et Anouk Bélanger-, demeurent des outils rigoureux disponibles grâce à l’Entente. La Ville souhaite poursuivre ce travail de réflexion et de documentation pour se donner les moyens de répondre à la complexité sociale et culturelle des villes modernes.

Il est à noter qu’un vecteur encore peu touché par les initiatives de médiation, et par les leviers financiers de l’Entente, fut absent des témoignages du 3 novembre 2009. Il s’agit des nouvelles plateformes numériques (et de ses applications novatrices dans diverses disciplines artistiques) qui occupent largement l’espace des relations humaines et des communications dans toutes les sphères de la société actuelle. La facilité des jeunes générations, notamment celles issues des communautés culturelles, à l’endroit de ces plateformes et des médias sociaux, appelle une réflexion sur le sujet.

Enfin, à partir de ces témoignages, la Ville a pu valoriser les activités d’accompagnement et de médiation culturelle menées en arrondissement et au sein du Réseau Accès Culture. À l’avenir, elle pourra mieux conjuguer la « pratique » de la médiation culturelle sur le terrain et la « théorie » entourant la diffusion et la médiation culturelle.


À consulter :
Le programme de la Journée – Novembre 2009 (PDF– 4 pages)

Entente sur le développement culturel intervenue entre la Ville de Montréal et le ministère de la Culture, des Communications et de la Condition féminineÀ noter : L’événement a été financé dans le cadre de l’Entente sur le développement culturel intervenue entre la Ville de Montréal et le ministère de la Culture, des Communications et de la Condition féminine.